Le samedi 29 novembre 2025, les gendarmes de la communauté de brigades de Saint-Joseph ont lancé une opération de grande envergure suite à la découverte d’un vaste champ de “Zamal”. Rapidement et avec précision, les forces de l’ordre ont démantelé cette exploitation illégale, procédant à la saisie de 2 337 plants de cannabis.
Deux personnes suspectées d’être à l’origine de cette culture ont été placées en détention provisoire. L’intervention a également permis de confisquer plusieurs véhicules, téléphones portables et sommes d’argent liquide. Selon les autorités, cette opération s’inscrit dans la lutte contre les trafics et les dangers liés à la consommation de drogue, en particulier pour la jeunesse locale.
Les gendarmes rappellent que le cannabis n’est pas une solution et constitue souvent une porte d’entrée vers les drogues dures. Leur message est clair : protéger les territoires et prévenir les addictions restent une priorité.



Zelda , le zamal est un produit existant, avec une certaine quantité, dans une préparation au moment de récolter
Bien que l’opération menée par les gendarmes à Saint-Joseph le 29 novembre 2025 ait permis la saisie de 2 337 plants de zamal et l’interpellation de deux personnes, il est légitime de questionner l’efficacité à long terme de cette approche répressive dans la lutte contre les trafics et les risques liés à la consommation.
Tout d’abord, l’idée selon laquelle le cannabis constitue une « porte d’entrée vers les drogues dures » est largement contestée par la recherche scientifique contemporaine. Cette théorie, souvent qualifiée de « gateway hypothesis », repose principalement sur des corrélations observées (les consommateurs de substances dures ont souvent commencé par le cannabis), mais de nombreuses études, y compris des méta-analyses et des travaux du National Institute on Drug Abuse (NIDA) aux États-Unis, montrent qu’il s’agit davantage d’une association due à des facteurs communs (environnement social, prédispositions génétiques, accès précoce à des substances légales comme l’alcool ou le tabac) plutôt qu’à un effet causal direct. Des recherches récentes, comme celles publiées dans le Journal of Experimental Criminology ou par RAND, indiquent que cette hypothèse ne tient pas lorsqu’on contrôle ces variables. Au contraire, dans des contextes de légalisation (Canada, Uruguay, certains États américains), aucune augmentation significative de la consommation de drogues dures n’a été observée, et parfois même une substitution du cannabis à l’alcool ou aux opioïdes, réduisant certains risques.
Ensuite, la prohibition actuelle alimente un marché noir qui génère violence et insécurité, plutôt que de les réduire. Des études sur l’impact de la légalisation montrent souvent une diminution des crimes violents et des propriétés liés aux trafics (par exemple, analyses en Colorado et Washington post-légalisation, ou au Mexique pour les zones frontalières). À La Réunion, où le zamal est profondément ancré culturellement et pousse naturellement dans un climat idéal, la répression crée un circuit illégal avec exportations vers Maurice, réseaux locaux et risques associés (armes, blanchiment). Une régulation contrôlée pourrait priver ces réseaux de revenus, tout en générant des taxes pour financer prévention et éducation.
Concernant la protection de la jeunesse, les données à La Réunion montrent une expérimentation élevée (environ 47 % des 17 ans en 2017, selon l’OFDT), mais inférieure à certains usages d’alcool ou tabac. La prohibition n’empêche pas l’accès : le marché noir ne vérifie ni l’âge ni la qualité, exposant les jeunes à des produits potentiellement adultérés (« chimique » ou résine importée). Des modèles comme celui du Canada ou de l’Uruguay, avec vente réglementée (âge minimum, dosages contrôlés, information), ont stabilisé ou réduit la consommation chez les mineurs, tout en améliorant la qualité et en finançant des programmes de prévention.
Enfin, le zamal réunionnais, variété endémique, pourrait représenter une opportunité économique légale (thérapeutique déjà expérimenté en France, ou récréatif dans un cadre encadré), diversifiant l’agriculture au-delà de la canne à sucre en déclin, tout en réduisant les coûts sociétaux de la répression (prisons, enquêtes).
Une politique plus nuancée, axée sur la réduction des risques, la régulation et l’éducation, protégerait mieux la population, notamment les jeunes, que des opérations ponctuelles qui ne font que déplacer le problème. Le débat mérite d’être ouvert, en s’inspirant d’expériences internationales réussies.