Le député Ratenon écrit à la Procureure de la République : « sommes-nous face à une justice politique ? »

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« Madame la Procureure de la République,

En ma qualité de parlementaire, je me permets de vous adresser ce courrier pour vous faire part de mes interrogations, qui sont essentielles en démocratie : sommes-nous dans une République digne de ce nom, ou avons-nous glissé lentement vers une République à géométrie variable ?

Je n’ignore pas que cette expression pourra heurter. Mais au vu de certains faits récents, et apparemment des différences dans le traitement judiciaire de certaines affaires, elle semble de plus en plus pertinente. Le citoyen lambda ne peut que s’interroger, voire s’inquiéter de la situation. J’ose penser que nous ne sommes pas face à une justice politique et de classe ! Je souhaiterais pouvoir en discuter avec vous de vive voix, si cela ne vous pose aucun problème.

Madame la Procureure de la République, sur ma circonscription, à la mairie de Sainte-Rose, des plaintes déposées en 2024 ont déjà donné lieu à des gardes à vue, des auditions suivies d’une convocation devant les tribunaux. Voilà une justice efficace, rapide, qui agit. Il faut le souligner : la justice sait se montrer diligente.

Autre constat du côté de la mairie de Saint-André, où des plaintes déposées tout récemment ont déjà débouché sur des enquêtes préliminaires, des perquisitions. Là encore, quelle belle rapidité… Pourtant, cette affaire semble être de faible ampleur si on la compare à d’autres… Sans pour autant m’avancer sur les conclusions de l’enquête. Mais alors, pourquoi un tel contraste avec d’autres dossiers pourtant bien plus graves ?

Tout en respectant bien entendu le temps judiciaire et la présomption d’innocence, je suis en droit de m’interroger sur l’opportunité de se saisir prioritairement d’une plainte à Saint-André, quand les éléments sont de taille du côté de Saint-Benoît.

« Aucun acte judiciaire public à ce jour contre la SPL Estival »

Prenons le cas de la SPL Estival. Les signalements et les plaintes remontent à plus de deux ou trois ans. Un rapport accablant de la Chambre régionale des comptes met en évidence des faits graves : déficit massif, mauvaise gestion, recrutements injustifiés, chèques irréguliers.

Au final : vingt-neuf licenciements, des baisses de salaire, et pour couronner le tout, un incendie suspect dans les locaux. Et pourtant… aucun acte judiciaire public à ce jour. Apparemment, aucun responsable auditionné. Aucun prestataire inquiété. Plus récemment encore, un marché public colossal de 210 millions d’euros, attribué à la CISE, soulève de vives inquiétudes. Quelques heures à peine avant l’attribution du marché, un collaborateur de cabinet de la CIREST et le directeur général du groupe SAUR (maison mère de la CISE) ont été photographiés, apparemment en boîte de nuit, partageant une bouteille de champagne.

Un hasard ? Une maladresse ? Ou une proximité suspecte ? Ce genre d’image jette forcément le doute sur l’impartialité de la procédure… Et cela d’autant plus que ce dossier fait lui aussi l’objet d’une plainte déposée, dont les suites tardent à se faire entendre, malgré les enjeux considérables.

En parallèle, la qualité du service rendu par la CISE continue de se dégrader : coupures d’eau régulières, problèmes de distribution, absence de transparence, probablement des augmentations de facture à venir…

Et pourtant, la société parvient à décrocher un contrat record jusqu’en 2037. Étonnant, pour ne pas dire plus.

Ajoutons enfin l’affaire du mur du stade Allane à Saint-Benoît, dont les travaux ont été engagés dans des conditions surprenantes. J’en profite également pour attirer votre attention sur des pratiques de recrutement que l’on m’a rapportées, pour le moins troublantes, observées dans plusieurs structures publiques locales proches de certains élus de Saint-Benoît.

Plusieurs embauches y ont été effectuées dans des conditions suspectes, souvent au bénéfice de personnes entretenant des liens familiaux, directs ou indirects, avec des élus en poste, ou affichant une proximité politique marquée avec certains décideurs locaux.

Ces recrutements, lorsqu’ils échappent à toute logique ou de besoin réel, interrogent non seulement sur la légalité des procédures, mais aussi sur l’usage des fonds publics et sur les risques de clientélisme, au final c’est toujours la population qui paie par la défaillance des services publics soit par les impôts.Je vous prie de trouver en annexe une liste de noms et de liens présumés (qui restera confidentielle). Il faut que la lumière soit faite sur ces affaires.

Madame la Procureure, lorsque les citoyens assistent à une justice capable d’une rapidité exemplaire dans certains cas, mais d’une lenteur dans d’autres, pourtant étayés par des documents officiels et des rapports accablants, la question de l’impartialité et de l’égalité devant la loi devient inévitable.

D’ailleurs, dès le mois d’octobre, un média révélait la possible implication de deux magistrats dans une affaire judiciaire qui secoue La Réunion. Face à de telles accusations, susceptibles d’ébranler encore plus la confiance des citoyens dans l’impartialité de la justice, pourquoi n’avez-vous pas fait le choix de délocaliser l’enquête, afin de préserver toutes les garanties de crédibilité de l’institution judiciaire ?

Et si cette justice n’est plus perçue comme un rempart contre les abus de pouvoir (s’ils sont avérés), mais comme un outil aux mains de certains, alors c’est tout le pacte républicain qui vacille. La réactivité de la justice ne doit-elle pas être la même pour tous?

Sommes-nous face à une justice politique ? … mais je pense bien que vous ferez tout pour me convaincre du contraire.

Et pour finir, permettez-moi de citer un édito : « Une justice sur commande, qui intervient deux mois (seulement) après le passage du Président de la République, Emmanuel Macron, chez l’ancien maire de Saint-André, Jean-Paul Virapoullé ; Une justice qui, visiblement, n’est pas pressée, en revanche, d’ouvrir une enquête préliminaire sur les détournements de fonds publics (plus de 400 000 €) relevés par la Chambre régionale des comptes au sein de la SPL Estival, à Saint-Benoît, en dépit du dépôt de plusieurs plaintes, parmi lesquelles celle de Joé Bédier, l’actuel maire de Saint-André. Comprenne qui pourra ! » Fin de citation.

Dans l’attente de voir émerger cette justice égale pour tous, et pas seulement pour certains, je vous prie de croire, Madame la Procureure, à l’assurance de ma vigilance parlementaire et citoyenne »

Yves Mont-Rouge

montrougeyves@gmail.com
Téléphone : 0692 85 39 64

10 Commentaires

  1. Et les emplois dans les lycées ?
    4 ans que c’est dans la main du Procureur. Le JIR a publié les contrats des neveux de Bello signés Bello. Des colistiers, nervis, parents, parents d’élus…tout signé Bello. Toute la Réunion a vu.
    Des dizaines et des dizaines. Des vieux travailleurs et des handicapés, virés comme des chiens Mr Ratenon. On attend votre action pour eux.

  2. Sommes-nous face à une justice politique …. Oui nous sommes face à une justice politique parce que ici ce sont les politiciens qui manipulent la procureure. quand on est copine avec elle on passe à travers les mailles on peut embaucher sa famille sans être inquiété vu ce qui se passe du côté des conseillers régionaux de bello à sitouze en passant par Maillot

  3. A quand une enquête à la région pour les emplois familiaux de tata Huguette et ses compères ?
    Ce dépité en fait de la justice une affaire politique. Il n’a pas apprécié le fait qu’on le mêle à la perquisition chez Joe Dalton à Saint André… Pourquoi vous n’en faites pas un communiqué aussi ?

  4. Bien dit la mR le député ,même si je ne suis pas d’accord sur certains de vos interventions et je ne voterai pas pour vous pour les municipales,ont la mare de ce maire et de son l équipe de bras cassés espérons que pour 2026 il y aura une intelligence de réflexion et d’analyse entre vous et RAMIN pour prendre la mairie de s Benoit

    • Moi aussi, j’avais écrit et je pensais fort cela : « je ne voterai pas pour vous ».

      Je l’avoue, je commence à revoir mes positions sur ce sujet.

      Attention ! je n’ai pas écrit être séduit par le vote RATENON.
      J’écris que cette hypothèse devient envisageable. Nuance.

      Attendons de voir la suite, lors de la campagne municipale qui s’annonce.

  5. Merci pour votre intervention publique.
    Ce n’est pas souvent, mais là oui : je vous rejoins dans vos idées, sur ce courrier à destination du Procureur de la République.

    Je souligne que vous êtes le seul élu (député) à avoir lancer publiquement cette question : la justice est-elle réellement impartiale?

    Merci.

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