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Vie chère en Outre-mer : le texte voté au Sénat est jugé « insuffisant »; Réactions d’Audrey Bélim et de Patrice Selly

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Une première étape a été franchie mais, pour autant, cette loi aujourd’hui portée par la nouvelle ministre des Outre-mer Naïma Moutchou, bien que votée au Sénat cette nuit (mardi 28 octobre), est toujours considérée comme « insuffisante » par les parlementaires ultramarins. Rappelons le contexte : le gouvernement a présenté ce projet de loi comme une urgence sociale en réponse à la forte inflation et à l’écart de prix croissant entre les territoires ultramarins et la métropole. 

En particulier, des mobilisations sociales en Martinique à l’automne 2024 ont mis en lumière l’injustice ressentie par les habitants face à des prix jugés excessifs pour les produits de première nécessité.   L’Insee souligne que dans certains territoires ultramarins, l’écart de prix sur les produits alimentaires peut atteindre jusqu’à 42 % par rapport à la métropole. Ce projet de loi ainsi s’inscrit dans une démarche de « justice sociale fiscale et économique » pour les Outre-mer, avec l’objectif de rapprocher les conditions de vie de celles de l’Hexagone. 

Le Sénat a donc adopté le projet de loi avec modifications lors de sa première lecture. Le projet de loi, dans sa version gouvernementale, se déployait autour de trois axes principaux Baisse de prix via des mécanismes législatifs visant à limiter les marges abusives, renforcer le bouclier qualité-prix, et corriger les « frais d’approche » (transport, logistique, etc.) qui pèsent fortement dans les territoires; Transparence et concurrence, mieux encadrer la concentration des acteurs économiques, lutter contre les ententes, améliorer l’information des consommateurs et transformation économique locale, à savoir encourager la production locale, la souveraineté alimentaire, valoriser les filières ultramarines, notamment par le biais du soutien aux producteurs locaux. 

Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat, par l’intermédiaire de sa commission des affaires économiques, a introduit ou validé plusieurs aménagements ou retraits pour limiter les effets jugés défavorables à certains acteurs locaux : suppression de l’article 1er, qui avait pour ambition d’exclure les frais de transport du calcul du seuil de revente à perte (SRP). Les sénateurs ont jugé cette mesure trop favorable aux grandes chaînes de distribution et trop risquée pour les petits commerces; Valorisation plus ambitieuse des produits locaux dans le dispositif du bouclier qualité-prix (BQP), avec une généralisation également aux services; Ajout de garanties pour éviter que l’expérimentation du e-hub (plateforme logistique ou numérique) se fasse au détriment des entreprises locales, en particulier en Martinique et suppression de l’article 5 permettant une habilitation trop large du gouvernement à légiférer par ordonnance concernant les mécanismes de péréquation des frais d’approche, si ceux-ci ne sont pas suffisamment cadrés. 

Le texte adopté est donc une version « modérée » du projet initial, avec des concessions faites pour préserver l’équilibre entre les grandes opérateurs et les acteurs locaux. Le texte a été adopté à main levée dans l’hémicycle du Sénat, sans débat prolongé sur les amendements. Il va être transmis à l’Assemblée nationale pour examen et vote. Le Sénat l’a adopté « en première lecture », ce qui laisse ouvertes de futures modifications ou retours selon le débat à l’Assemblée nationale. 

Certains parlementaires saluent le fait que le texte ait franchi une étape, et que le gouvernement montre une volonté de traiter le sujet de la vie chère outre-mer comme une priorité.  Les modifications sénatoriales sont parfois vues comme des correctifs nécessaires pour préserver les petits acteurs économiques ultramarins. Le consensus sénatorial est largement marqué par une certaine : nombre d’élus ultramarins estiment que le texte est en effet, « insuffisant », trop technique ou trop timide pour répondre à l’ampleur des défis. 

La commission sénatoriale a sévèrement critiqué la portée réelle des mesures proposées : même cumulées, elles ne seraient pas de nature à modifier fortement la formation des prix en Outre-mer, selon certains rapporteurs. 

L’absence d’un volet social fort (mesures sur les revenus, les salaires, les aides directes) est pointée comme une faille majeure : le texte se concentre presque exclusivement sur l’offre, les marges et la logistique, laissant de côté la question du pouvoir d’achat direct des ménages. Certains estiment que ce texte pourrait devenir « une loi-extincteur », c’est-à-dire un texte destiné à apaiser les tensions sans produire de changements réels. Enfin, la contrainte budgétaire (issue de Bercy) est souvent citée comme frein au déploiement d’une politique ambitieuse. 

Les enjeux à venir sont : son application effective; Le principal défi sera de traduire les mesures adoptées en effets concrets sur les prix et la vie quotidienne dans les territoires ultramarins; La balance entre acteurs : comment garantir que les petits commerces et producteurs locaux ne soient pas écrasés par les grands groupes dans la mise en œuvre du texte ? L’approche structurelle : les critiques soulignent qu’une réforme durable doit s’attaquer aux fondements (logistique, transport, insularité, coût du fret) — ce texte engage, mais pourrait rester insuffisant sans un plan plus massif; La discussion à l’Assemblée nationale : le texte va probablement être amendé, renforcé, ou débattu dans des versions plus ambitieuses selon les sensibilités politiques et la surveillance citoyenne : les associations, les élus locaux et les médias seront attentifs à ce que les promesses ne restent pas lettres mortes. Il reste encore un long chemin à parcourir…

Audrey Bélim, sénatrice PS : « des avancées encore largement insuffisantes »

« le Sénat a adopté en 1ère lecture le projet de loi de lutte contre la vie chère dans les Outre-mer. À cette occasion, sur les 124 amendements à l’examen en séance publique, plus des deux tiers étaient proposés par le groupe des sénateurs socialistes. Malgré les avancées obtenues par l’adoption de 25 amendements – dont 12 socialistes – les avancées restent très
insuffisantes au regard des enjeux.
La droite sénatoriale Les Républicains et les macronistes ont empêché l’adoption de nombreuses propositions que j’avais déposées : suppression de la double fiscalité des colis postaux personnels, personnalité morale pour les Observatoire des Prix, des Marges et des
Revenus, une lutte efficace contre les monopoles et oligopoles, etc.)
J’ai cependant réussi à faire adopter plusieurs amendements qui vont dans le bon sens. Ainsi, ont été adoptés : l’interdiction du géoblocage volontaire et injustifiée de sites
internet, applications et autres contenus audiovisuels et culturels (SNCF, Fnac, Canal +…),
la conditionnalité des aides de l’État et des collectivités territoriales aux entreprises au respect de leur obligation de publication des comptes sociaux, l’intégration des produits consignés et réemployés au dispositif du Bouclier Qualité Prix (BQP), la nomination de deux membres, issus de différents bassins océaniques, au sein de l’Autorité de la Concurrence,
la déconcentration de la régulation des prix de produits de première nécessité au niveau du préfet en cas de crise (cyclone, épidémie…).
D’autres amendements socialistes, notamment ceux de mon collègue Victorin Lurel, reprenant plusieurs mesures de sa proposition de loi examinée en mars dernier, ont été également adoptés. Ils élargissent et durcissent, entre autres, les obligations de transparence des entreprises lors de la publication de leurs comptes.
Je regrette cependant que Les Républicains (LR), les macronistes et les centristes aient rejeté des dispositions telles que la personnalité morale pour les Observatoire des Prix, des Marges et des Revenus, la suppression de la double fiscalité des colis postaux personnels,
plusieurs propositions ambitieuses pour une plus grande transparence des grands groupes et la lutte contre les monopoles et oligopoles, sur les frais bancaires et des services de manières plus larges pour ne citer qu’elles.
J’espère que la navette parlementaire de ce texte, initialement faible, permettra d’intégrer de nouvelles et fortes mesures pour avoir de réelles conséquences sur le ticket de caisse des Réunionnaises et des Réunionnais ».

Patrice Selly : « peu d’avancées concrètes, le compte n’y est pas »

Patrice Selly est maire de Saint-Benoit, président de la Cirest et président du parti politique « Banian ». Voici sa réaction concernant le projet de loi :  « Le projet de loi actuellement en discussion ne répond pas aux attentes légitimes des Réunionnais. Les avancées concrètes sont encore trop limitées pour garantir une continuité territoriale efficace des biens et des services sur notre île : « à travers une meilleure prise en charge par l’État du transport de marchandises vers les Outre-mer, afin de réduire le coût de la vie. Les efforts ne peuvent pas peser uniquement sur les classes moyennes et familles modestes, qui peinent déjà à s’en sortir ».

Il est impératif de rappeler que l’État doit jouer un rôle central : « Il est inacceptable que les classes moyennes et familles modestes, qui peinent déjà sous le poids du coût de la vie, soient les seules à supporter les efforts nécessaires pour améliorer notre situation. Nous avons besoin d’une véritable solidarité nationale ! »

Bien que ce texte prévoie des mesures d’encadrement des prix et un soutien au pouvoir d’achat, il est insuffisant : « Je réclame instamment l’instauration immédiate d’une TVA à zéro sur les biens de première nécessité ainsi que sur certains services essentiels. Cette mesure est cruciale pour alléger la charge pesant sur les épaules des ménages et pour soutenir le pouvoir d’achat de tous les Réunionnais ».

Nous devons également envisager une révision profonde de l’octroi de mer : « Cet outil doit devenir un véritable levier au service de notre développement local et non un frein à l’importation de produits indispensables à notre vie quotidienne ». En outre, une politique effective de péréquation des coûts s’impose pour que la distance géographique de notre île ne soit plus synonyme d’inégalités économiques.

« Je ne saurais trop insister sur la nécessité d’accroître la transparence des chaînes d’approvisionnement et de réguler les marges des importateurs et distributeurs. Des sanctions doivent être appliquées face aux abus de position dominante et aux pratiques déloyales qui nuisent à nos concitoyens ».

De plus, la promotion des circuits courts ne doit pas être reléguée au second plan. Elle doit devenir une priorité pour renforcer notre souveraineté alimentaire et notre résilience économique : « Bien que le texte propose d’allouer une part de la commande publique à la production locale, il manque de l’ambition nécessaire pour valoriser réellement nos circuits courts ».

Les Réunionnais, citoyens égaux devant la République, ne peuvent tolérer d’être perçus comme des Français de seconde zone : « Notre pays, fort de son attachement à l’équité, se doit d’assurer pour La Réunion une pleine continuité territoriale. Ces demandes de justice et d’égalité ne relèvent pas d’un privilège, mais d’un droit que nous devons revendiquer avec fermeté et détermination ».

La Réunion doit faire entendre sa voix et exiger que ces solutions soient mises en œuvre. Ces exigences portent la marque d’une justice et d’une égalité que nous nous devons de réclamer avec fermeté et constance ! »

 

Yves Mont-Rouge

montrougeyves@gmail.com
Téléphone : 0692 85 39 64

4 Commentaires

  1. Selly avant de critiquer commence par regarder les employés communaux. Certains sont encore à mi-temps et vous ne faites rien pour eux et cessez de mentir et dire que tout le monde est passé à temps plein. ça donne des leçons mais ne fait pas mieux c’est plus facile de critiquer.

  2. Mais quel faux cul ce Selly. Il a passé son temps à augmenter les taxes de la Cirest qui aujourd’hui appauvrissent les citoyens de l’Est. Il a augmenté ses indemnités de président de la cirest et il fait la pleureuse face à ce projet de loi alors que à cause lui Saint Benoît est devenue la deuxième ville de plus de 20 000 habitants la plus pauvre de France après Roubaix J’espère que le bénédictins réfléchiront avant de glisser leur bulletin de vote

  3. donn encore l’a pas assez….. les socialistes qui ont foutu la France à terre continuent….. c’est à cause de leur politique d’assistanat sans travailler qu’on en est là . Un peuple devenu feignant, délinquant, et des politiciens qui ne servent à rien

  4. Rêve pas Audrey , les pots de vin sont présents , et nous mourons pauvres a petit feu ! La légion d’honneur est donné a qui le mérite dans sa force d’exploitation humaine !.? Bientôt c’est la nouvelle marseillaise  »sucons , suçons et vivre le couillon qui s’entube sans god

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