Réuni en assemblée plénière ce mardi 28 octobre 2025, le Conseil économique, social et environnemental régional (CESER) de La Réunion a adopté deux avis majeurs :
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sur les Orientations budgétaires 2026 du Conseil régional ;
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et sur la Décision modificative n°2 du budget 2025.
Ces deux documents, riches d’analyses et de recommandations, dressent un tableau complet de la situation financière et des enjeux de développement du territoire.
Un contexte budgétaire contraint, mais une ambition affirmée
Dans un contexte mondial et national incertain — inflation persistante, croissance molle (+0,5 % à La Réunion en 2024), baisse annoncée des dotations et réformes fiscales à venir —, le CESER appelle à “faire mieux avec moins”.
L’instance consultative salue la volonté de la Région de maintenir une épargne brute proche de 25 % des recettes réelles et une capacité de désendettement sous les 9 ans, tout en poursuivant les investissements structurants (notamment la Nouvelle Route du Littoral et le futur Réunion Express).
Mais elle alerte sur la fragilité du modèle : “Les incertitudes européennes, la réforme de l’octroi de mer, ou encore la baisse de la taxe sur les carburants liée à l’électrification du parc automobile doivent être anticipées dans une prospective à cinq ans”, souligne la commission « Finances et Évaluation de l’action publique ».
“Retrouver le sens du temps long”
Dans son éditorial, le président du CESER insiste sur la nécessité de replacer l’action publique dans la durée :
“Krisis, en grec, signifie discernement. Nous devons désormais passer de la crise à la construction, de la réaction à la planification.”
Le Conseil préconise d’actualiser le Plan Pluriannuel d’Investissement (PPI) et le Plan Pluriannuel de Fonctionnement (PPF), en en faisant de véritables outils de pilotage stratégique. Il suggère aussi la création d’un Comité régional de suivi et d’évaluation des politiques publiques, pour renforcer la redevabilité et la confiance démocratique.
Les grands axes de la mandature confirmés
1. Développement humain et solidaire
La Région entend poursuivre ses politiques éducatives et sociales :
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réhabilitation et construction de lycées (Lycée de la Mer, lycée du tourisme, lycée adapté),
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lutte contre la chaleur dans les établissements,
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dispositifs de soutien aux familles (cantine à 1 €, EKIPAOU, Kap Réussite),
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déploiement des grands schémas CPRDFOP et SRESRI pour la formation et l’enseignement supérieur.
L’action culturelle et sportive reste un pilier, tout comme la cohésion sociale et l’égalité femmes-hommes.
2. Développement économique et emploi
Le Schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) “Nouvelle Économie” se poursuit.
Le CESER salue les efforts en faveur des TPE (plans KAP TPE, FAIRE) et la création d’un pôle territorial des industries culturelles et créatives (ICC).
L’instance encourage une approche territoriale équilibrée, notamment dans l’Est, et une meilleure structuration des politiques économiques autour de la souveraineté alimentaire, énergétique et industrielle.
3. Développement durable et transition écologique
La Région réaffirme l’objectif de 100 % d’énergies renouvelables d’ici 2050 et la révision prochaine de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
Le futur Schéma d’aménagement régional (SAR 2050) sera arrêté en 2026, dans une logique d’aménagement harmonieux et de mobilité durable (Réunion Express, voies vélo régionales, étude “Car hydrogène”).
Le CESER insiste sur la cohérence de ces politiques et sur la nécessité d’un “budget vert”, intégrant les impacts sociaux et environnementaux des dépenses publiques.
Europe, coopération régionale et rayonnement international
L’avis consacre un long chapitre à la politique européenne et de coopération régionale, jugée stratégique pour l’avenir du territoire.
La commission « Territoires, Europe et Coopération » salue la dynamique du programme INTERREG VI et les 59 projets déjà programmés, tout en appelant à :
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renforcer les moyens humains pour accélérer la certification des fonds européens,
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défendre le statut des Régions ultrapériphériques (RUP) dans la future programmation 2028-2034,
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simplifier l’accès aux fonds européens pour les porteurs de projets,
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et intensifier les partenariats économiques régionaux, notamment avec l’Afrique australe, Madagascar et les Comores.
La Réunion doit, selon le CESER, “s’affirmer comme un acteur diplomatique et économique de la zone indopacifique”.
Vers une “nouvelle société réunionnaise”
Enfin, le CESER relie ces orientations à sa démarche “Nouvelle Société Réunionnaise” : une méthode des 4C (Cohérence, Coordination, Contractualisation, Co-construction) et trois “fils rouges” :
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Évaluer, pour comprendre les effets réels des politiques ;
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Dialoguer, pour renforcer la cohésion territoriale ;
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Anticiper, pour penser le futur au-delà de l’urgence.
“La krisis de 2025 nous apprend à discerner ; le temps long de 2026 doit maintenant nous apprendre à tenir nos engagements”, conclut le CESER.
En résumé
Face aux incertitudes économiques, le CESER appelle à une planification responsable et partagée, fondée sur la transparence, l’évaluation et la prospective.
Son message est clair : pour bâtir La Réunion de 2050, il faut inscrire chaque décision publique dans le temps long — celui de la confiance, de la continuité et de la construction collective.


